Ça tourne



Encore avec le logiciel Blender que j’essaie d’utiliser, je me suis essayé aux fonctions de contraintes. Deux roues dentées de la même taille, l’une entraînant l’autre forcément en sens inverse. Pour corser un peu, j’ajoute une troisième roue dentée d’un diamètre réduit de moitié et d’un nombre de dents également divisé par deux. Celle-ci tourne nécessairement deux fois plus vite que celle qui l’engrène.
J’exporte cette animation en .png et importe les images dans gimp afin de réaliser un gif animé.
Ces deux logiciels sont libres (et gratuits) et fonctionnent sur Linux, Windows et, heureusement pour moi, sur MacOS.

Des bulles mais pas de BD


Ce matin, je me réveille vers 3h30 et c’est trop tôt. Peut-être pas pour tout le monde mais pour moi, oui. Je suis réveillé, je bois du café et je démarre l’ordinateur. Je bosse sur deux ou trois trucs en attente, un problème d’envoi de mail depuis une boutique en ligne, un petit livret de dessins à colorier pour les enfants et quelques messages en attente de réponse.
J’envoie un document par mail. Il est déjà presque 8h30. La réponse ne tarde pas à arriver et, en guise de réponse, ça s’applique à la perfection de ne répondre à rien. Je renvoie un mail pour demander une réponse. Je reçois un mail dans lequel on me demande quelle était la question. J’ai un doute. Je vérifie le premier mail envoyé. Je suis rassuré. Il y a bien la question, simple et précise. Je suis rassuré mais je sens l’agacement commencer à me gagner. Je réponds en remettant la question. Nouvelle réponse idiote. Là, j’arrête. Je n’ai pas envie de jouer avec quelqu’un qui ne comprend pas. Et puis, je me souviens que j’ai de la vaisselle à faire.

Quarante ans

Quel est le point commun entre Tino Rossi, Léopolp III (roi des Belges), David Niven, Klaus Nomi, Mohamed Zerbout, Joan Miró, René Bonnet, Louis de Funès, Jean-Marc Reiser, Tennessee Williams, Georges Rémi (Hergé) et tant d’autres qui ne sont pas passés à la postérité ? Ils sont tous morts en 1983.

Reiser est mort le 5 novembre 1983. Pourquoi pense-je à Reiser depuis plusieurs jours ? Je me souviens bien qu’il est mort en 1983, ça, pas de problème. Je me souviens même comment je l’ai appris et où je l’ai appris. C’était à Brive-la-Gaillarde, à la devanture d’un marchand de journaux. Une couverture rouge avec un dessin de Reiser, celui qu’il avait fait pour la mort du dictateur Franco[1]. Ça avait été un choc pour moi. J’espérais que ce soit une blague de mauvais goût de la part de l’équipe de Hara Kiri sans y croire. J’ai acheté ce numéro spécial, je dois l’avoir quelque part.
Reiser, je ne sais pas en quelle année je l’ai découvert mais je sais où. C’était à Saint-Germain-en-Laye, chez mon oncle, le frère de ma mère. J’étais petit. Je ne sais pas trop ce que je foutais là, peut-être que l’on m’avait confié au tonton histoire d’avoir un peu la paix. J’aimais bien aller chez mon tonton. Il y avait plein de revues qui n’étaient clairement pas destinées à la jeunesse. J’y lisais Hara Kiri mais aussi L’Écho des Savanes (celui de Brétécher, Mandryka et Gotlib). Je me souviens que j’avais tout de suite été séduit par les dessins de Reiser. C’est curieux parce que, a priori, les gribouillis tremblotants de Reiser ne sont pas de nature à séduire. Je ne sais pas, c’est comme ça. Dans mon souvenir, il me semble que les premières BD de Reiser qui me sont tombées sous les yeux sont celles qui sont dans l’album “La vie au grand air”. Un autre souvenir, celui d’un mot sur lequel je buttais, un mot que je ne comprenais pas : cul. Je demande à mon oncle qui, comme si vraiment j’étais trop con, comme s’il était désolant d’avoir un neveu aussi bête que moi, en haussant les épaules et d’un ton méprisant et outré, m’explique ce qu’est un cul. Je lui dois beaucoup pour mon parcours éducatif.
Par contre, voyez comme les souvenirs sont fourbes, ça ne peut pas être dans les planches de “La vie au grand air” puisque, me semble-t-il, il n’y a pas un mot “prononcé” dans toutes les histoires qui composent cet album, histoires parues d’abord dans Hara kiri. Ce n’est pas grave mais je tiens à être clair en affirmant que tout ce dont je peux me souvenir de cette époque peut tout à fait être totalement faux ou, du moins, n’avoir jamais existé sous la forme gravée dans ma mémoire. Mais nous ne sommes pas là pour discourir de la fabrication des souvenirs et je n’ai aucune qualification pour le faire.
Par exemple, là, il faudrait réussir à déjà s’assurer de la période à laquelle mon oncle a vécu dans son petit appartement de Saint-Germain-en-Laye. Lui, il n’est plus là pour le dire ; ses enfants n’étaient pas nés, je n’ai pas de contact avec son ancienne femme, ses parents sont morts. Il faudrait que je demande à ma mère. On va dire que c’est entre la fin des années 60 et le début des années 70. L’histoire c’est que selon que ça s’est passé (ou pas) lorsque j’avais, disons, quatre ou cinq ans ou que j’en avais sept ou huit, ce n’est pas la même histoire. Je passe tantôt pour un enfant légèrement précoce ou pour un attardé. Aujourd’hui, franchement, si je raconte un souvenir qui s’est passé dans les dix dernières années sans me souvenir vraiment quand, ça n’a pas la même implication.

Je suis là pour parler de Reiser mais je me souviens bien qu’il y avait un autre dessinateur qui m’étonnait et me plaisait beaucoup. C’était Gébé et aujourd’hui on n’en cause plus beaucoup (hormis pour l’An O1). Mais bon, Reiser, donc. Voilà, il était mort. D’un cancer des os. Je ne savais pas qu’il était malade. Dans le numéro spécial que sort Hara Kiri, on peut lire des textes hommages. J’apprends qu’il est mort de ce cancer et qu’il a refusé l’amputation de la jambe malade (la gauche ou la droite ? Je ne me souviens pas que ça a été dit. Ça pèche d’un cruel manque de précision, cette histoire). Moi, me dis-je à l’époque, c’est vraiment trop bête de mourir pour une jambe. On peut dessiner avec une jambe en moins, non ? A moins de dessiner comme un pied mais bon…
Ce dont j’avais conscience, en cette fin d’année 1983, c’est qu’il n’y aurait plus de dessins de Reiser. J’allais cependant, plus ou moins régulièrement, continuer à acheter Hara Kiri. Je ne sais plus en quelle année avait cessé la parution de Hara Kiri Hebdo. 1981 ? 1982 ? Je suis presque certain qu’il n’existait plus en 1983. De tout façon, c’était le début de la fin. Il y avait eu le “Droit de réponse” de Michel Polac, le constat que le public attendait autre chose, que l’humour bête et méchant (et sale et grossier et vulgaire et pornographique…) n’intéressait plus voire même dégoûtait. C’est dans ces années là que la bande dessinée de Gourio et Vuillemin, “Hitler=SS”, dont les planches sont d’abord parues dans Hara Kiri, est au centre d’une polémique qui conduira à la quasi interdiction de vente de l’album en 1987. On accusera alors les auteurs de faire l’apologie du nazisme (ce qui est à mon sens ridicule).
C’est en 1983, en mars, que j’obtiens mon permis de conduire. Je suis majeur. De cette année 1983, je ne me souviens presque que de ces deux faits. Le permis et la mort de Reiser. J’avais oublié que Hergé et de Funès (mais aussi Luis Buñuel) étaient morts cette même année. D’ailleurs, en allant vérifier la liste des morts de l’année sur wikipedia, je découvre que Reiser n’y est pas. Bon. Peut-être bien que Reiser n’aura pas non plus tant marqué les esprits que je le peux penser. Je n’ai pas suffisamment de contact avec les jeunes générations pour savoir s’il est encore un peu connu et lu par d’autres que les vieux cons. Ça n’a pas grande importance.
J’aurais aimé savoir dessiner comme Reiser. Comme ça, on peut penser que c’est facile, que ce ne sont que quelques traits mal foutus jetés sur du papier sans souci de la belle facture, de la noblesse du travail au pinceau ou à la plume. Fichtre ! C’est que l’on est bien loin d’un Hugo Pratt, d’un Franquin ou d’un Uderzo ! Alors, oui, certes. Il n’empêche qu’il est terriblement risqué de s’essayer à pomper son style (ou son absence de style si l’on n’aime pas). Peut-être Salch se rapproche-t-il un peu de lui dans l’idée mais il est bien loin de l’égaler. Reiser, c’était aussi une poésie, un désespoir fou. D’une ligne, il vous dessinait une femme qui vous faisait lever la quéquette, il vous émouvait, il vous faisait ressentir la détresse humaine, la bêtise humaine, la beauté humaine. Reiser vous faisait aimer l’écologie, il arrivait à vous expliquer la marche du monde, la vacuité des riches, la tristesse des pauvres. Tenez, une planche qui reste gravée dans ma mémoire. Une petite vieille arpente un trottoir bordé de voitures. Elle est avec un sécateur et, systématiquement, elle coupe les antennes radio les unes après les autres. Tchak ! Tchak ! Dernière case, elle est chez elle, devant la cheminée où elle a placé les antennes et elle maugrée après ce bois qui ne veut pas prendre. Si ce n’est pas du génie, ça ! Et puis, il y a Jeanine, mère indigne belle à craquer, il y a Gros dégueulasse, sorte de Diogène détesté de tous qui vous explique la société à partir d’une boîte de cassoulet. Génie, je vous dis. Il y a du vrai engagement dans Reiser. De la dénonciation, de l’amour, de la satire sociale.
Aujourd’hui, il aurait 82 ans. Pas sûr qu’il trouverait où publier ses dessins s’il dessinait toujours. On a dit que Hara Kiri Hebdo n’avait pas survécu à l’arrivée de la gauche au pouvoir. C’est peut-être vrai. Il est possible même que Hara Kiri n’ait jamais été de gauche. Ses heures de gloire ont toutes été durant les successifs pouvoirs de droite et on peut supposer que Hara kiri devait beaucoup à la droite, à cette France de beaufs, de veaux, de crétins, de salopards. Lorsque Mitterrand arrive, il y a une fange frange du “peuple de gauche” qui va faire naître la “gauche caviar” avide de bon goût, de beaux sentiments et de bien-pensance. Ça nous a conduit à ce que l’on a connu de pire, du Charlie Hebdo de Philippe Val jusqu’à Macron. C’est con à dire mais il me semble que avait plus de liberté d’expression sous de Gaulle, Pompidou et Giscard qu’après eux. Malgré la censure. En fait, ce n’est pas si con. Il y avait une vraie presse de gauche qui mordait aux fesses les détritus de droite, une presse de gauche offensive, hargneuse. Voyez, pour ne citer que ces titres, ce que sont devenus Libé ou le Nouvel Obs depuis les années 80. Du bling-bling en veux-tu en voilà, de la dégoulinance obséquieuse à longueur de pages, de la critique retenue. C’est à chier, c’est à vomir. Ça sort par les orifices.
Pour vous dire la force de Reiser par-delà la mort. Rien que de penser à lui depuis quelques jours, je sens une sourde colère et un bruyant désespoir me gagner et je vois rien qui fasse écho à cela comme aurait pu le faire Reiser.

Lisez, relisez Reiser.

Note

[1]

Une Traction avant moins blanche et moins cabriolet qu'une récente autre montrée sur ce blog récemment

La Traction avant a marqué son temps et elle est aujourd’hui encore considérée avec respect et sympathie. S’il est correct de rappeler qu’elle a connu un désamour de la part du grand public fut un temps, parce qu’elle était trop banale, trop nombreuse, trop vieille, il ne lui a pas fallu longtemps pour attirer les collectionneurs amateurs et à se faire leur place dans les musées et autres salons réservés aux automobiles plus ou moins anciennes.
Dans la période qui couvre la fin des années 1970 et le début de la décennie suivante, si l’on n’en croisait pas à tout bout de champ, elles étaient encore quelques unes à être utilisées au quotidien. Les plus récentes affichaient une bonne vingtaine d’année et une allure qui était déjà bien datée. Oui, la Traction avant faisait vieillotte face aux Citroën CX, aux Renault 20 et 30, aux Simca Chrysler 1307 et 1308, aux 504 et 505 Peugeot. Cependant, elle avait une apparence que l’on pouvait qualifier d’intemporelle tellement sa carrière avait été longue et sa ligne identifiable à coup sûr.
Dans ces années 80 où la France vibrait à la mode des customs, des jantes larges et des ailes élargies, des couleurs vives, des améliorations de toute sorte, la Traction avant a été plutôt épargnée et ce n’est pas le cas des Juvaquatre, Aronde, Rosalie, 203 et 403, Celtaquatre et, pour faire simple, un peu de tout ce qui avait des roues et un moteur. Il y a bien eu des réalisations faites sur la base de la Traction mais, le plus souvent, la ligne générale était préservée.
Tour à tour voiture des catégories aisées puis des miliciens et gestapistes avant d’être celle des malfaiteurs, des taxis, des gens peu fortunés, la Traction avant a su tenir sa place jusqu’à l’arrivée de la DS qui lui donna le coup de grâce. Comment rivaliser face à ce monstre de modernité et de technologie ?
Aujourd’hui, elle parade souvent dans les rallyes automobiles, elle a sa place dans les salons et elle plaît toujours autant à celles et ceux qui l’ont connue comme à ceux qui la découvrent.

Traction avant Citroën

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