J'aime bien les utilitaires, j'aime bien les pick-up américains qui ont la gueule de ce que l'on ne fabrique pas ailleurs. J'aime bien aussi les Peugeot 203 plateau et même les 404.
Là, c'est un Chevrolet Apache. Il est relativement beau ou, du moins, relativement intéressant. Pour marquer sa destination utilitaire, pour montrer que c'est un véhicule qui a pu travailler et qui porte les affres du dur labeur auquel il a pu être soumis, on a peint de la corrosion en quelques endroits savamment choisis. J'ai bien regardé, de près, et c'est bien du maquillage. Et après tout, ai-je envie de dire : et pourquoi pas ?
Comme le notait avec justesse et à-propos un célèbre lecteur de ce blog et héros des temps modernes avec qui je cheminais lors de ces Vintage Days 2024, les Indiens, on leur aura vraiment tout volé. Et de fait, on peine à comprendre l'apport des peuples apaches à la genèse de ce pick-upChevrolet de 1959. La couleur, peut-être (quoiqu'il en existe des bleus).
Tandis que, longtemps, en France, le pick-up (plateau bâché ou non en français) a été cantonné à son rôle d'utilitaire au service des artisans, aux États-Unis d'Amérique il est aujourd'hui encore le véhicule de prédilection pour une large partie de la population. Cela fait que plutôt que de se cantonner dans des motorisations juste suffisantes, les marques américaines ont vite fournis de gros moteurs avec plein de chevaux pour ces engins.
Ici, nous sommes en présence d'un Chevrolet Apache de 1959. Il s'agit du type 31 mais il existe un type 32. La différence entre les deux est de taille puisque c'est la longueur de la benne qui les distingue. S'il n'a pas les jantes d'origine et s'il n'est pas impossible que le moteur ait eu droit à une préparation visant à encore améliorer les performances, le reste me semble assez dans l'esprit de l'origine.
Maintenant, reste la question de l'attrait pour la production automobile américaine. Si je ne rejette pas tout en masse, il me semble que je conserve une très nette préférence pour les automobiles européennes. Peut-être est-ce parce qu'elles me sont plus familières. Elles me paraissent tout de même bien moins tape-à-l'œil et clinquantes, plus "classes".
Le véhicule du jour est clivant. Soit on aime, soit on déteste. Moi, j'aime. Pour les "contre", il y a principalement l'argument qui dit que l'on ne doit pas détruire ou dénaturer les véhicules du patrimoine, les véhicules anciens, de collection. Ceux-ci disent que le respect de la plus stricte restauration à l'origine est la seule voie qui soit. Et on peut entendre cela.
Pour les "pour", on dit que l'on a bien le droit de faire ce que l'on veut d'autant plus si l'on a un véhicule, certes assez ancien, mais relativement commun et dans un état de quasi épave. Dans l'idée, la restauration à l'état concours d'un véhicule déjà bien présent dans des musées ou dans des collections privées est une option comme une autre et la relative rareté n'entre que peu dans l'équation.
Le camion Ford présenté aujourd'hui est un modèle canadien qui a été produit à grande échelle. Chez nous, bien sûr, on le connaît peu. Certains sont arrivés chez nous, sur le continent européen, après la seconde guerre mondiale. Je ne connais pas exactement l'histoire de ce camion mais ce qui est certain, c'est que son propriétaire actuel est parti d'un modèle déjà bien attaqué par la corrosion. Sans doute aussi était-il incomplet.
L'idée de le transformer pour en faire une sorte d'œuvre d'art roulante a fait son chemin. Et le résultat me plaît et m'amuse. Le concept englobe l'imaginaire post-apocalyptique des films et histoires de zombies qui auraient entrepris de bouffer le cerveau des vivants même pas morts. On notera que leur plan est un peu faible. Que boufferont-ils une fois qu'ils auront converti toute la population mondiale des simples mortels en morts vivants ? Je ne suis pas sûr que ces zombies là réfléchissent si loin.
Il y a plein de détails amusants comme la tête de zombie coincée dans la grille de radiateur ou les animaux empaillés qui dépassent d'un peu partout. La carrosserie (ce qui n'est pas bouffé par la rouille) est badigeonnée d'un mélange d'huile de vidange et de gas-oil. A cela, deux raisons principales. La première est que ça freine la progression de la corrosion. L'autre, c'est que ça dissuade le curieux badaud de toucher l'œuvre. Ce n'est pas idiot.
Un petit détail que je trouve très ingénieux se voit dans les bouchons d'échappement accrochés le long des tubes gauches. A droite, on a préféré un échappement bas qui court le long de la cabine. Et pourquoi pas ? Les accessoires ont été dénichés au hasard des découvertes et intégrés au mieux. Pour la mécanique, on a viré le moteur d'origine pour le remplacer par un bon V8 de chez Chevrolet. C'est bien mieux pour le bruit.
Et puis, il y a la remorque qui permet d'amener la Harley Davidson traitée selon les mêmes principes ingénieux. Et puis, surtout, il y a le propriétaire, bricoleur inspiré, mécanicien de génie, qui n'est pas avare pour parler de sa création avec l'humour qui est de rigueur.