Les Français sont amusants. Ils se pensent supérieurs à tous, s'imaginent une gloire sans nulle autre pareille, s'estiment phares de la pensée universelle, se racontent que leur gastronomie est la meilleure, voient leurs paysages, leurs monuments, leurs châteaux, leur histoire comme autant de merveilles que le reste du monde leur envie, persistent malgré les classements internationaux et les chiffres à se croire intelligents, glorifient leur langue pour mieux refuser d'en parler d'autres et ne comprennent pas que, tout autour de leurs frontières, on rit d'eux.
Le Français n'est jamais content. Il conteste, il revendique, il proteste, il se met en grève pour un oui et pour un non, il accuse les autres d'être à la source de ses malheurs et, pendant ce temps, alors que le monde avance, il recule. Le Français est un éternel reliquat du passé. Il ne sait pas vivre dans le présent, est incapable de penser l'avenir et se réfugie dans un passé fantasmé. Il est un peu pitoyable, si vous me permettez l'expression.
Le Français a ses valeurs bien à lui. Le vin, le fromage et le cassoulet. Il n'aime pas la réussite, est presque inquiet lors d'une victoire sportive, vit dans la crainte des mauvais jours, se rue sur les rouleaux de papier toilette à la moindre alerte, vitupère contre ceux qui gagnent, les riches. Le Français vit dans un monde clos. Ce qui est hors de ses limites territoriales n'existe pas. Il vit dans un monde imaginaire forgé de traditions qu'il croit millénaires. Il se dit que la France a su gagner des guerres et que l'ensemble des pays étrangers doivent bien comprendre qu'il ne fait pas bon s'attaquer à un puissant pays comme le sien, le meilleur, le plus beau, le plus fort. Il se persuade avoir encore de l'influence sur le reste du monde et est prompt au cocorico qui fait si bien sourire à l'extérieur. Pour tout dire, le Français est "has been". On ne peut pas être et avoir été et, si jamais la France a été grande un jour, ce n'est aujourd'hui qu'un pays en pleine décrépitude perdu dans une Europe qui patauge.
Et pourtant, il suffirait d'un peu de vision, d'un poil d'optimisme, d'une pincée d'intelligence supplémentaire pour que le Français perçoive la réalité et, surtout, la chance qu'il a. Par exemple, l'inflation. Il ne se passe pas un jour sans que l'on entende l'un ou l'autre de ces Français se plaindre (ça, il sait faire) de l'inflation. Et les prix qui s'envolent, et les fins de mois de plus en plus difficiles, et les repas que l'on doit sauter, et le prix de l'immobilier, la difficulté à trouver où se loger, le prix du carburant. Il accuse ses dirigeants, les dit incapables quand il ne les dit pas à la solde des plus riches, est contre les réformes. Il les a élus, il les a voulus, il les a eus, pourtant, ces dirigeants politiques.
Pour autant que je m'en souvienne, Emmanuel Macron a été choisi, voire plébiscité, sans que les électeurs et électrices soient menacés d'une arme dans l'isoloir. Le programme n'a jamais été caché, ce qu'il a fait, c'est peu ou prou ce qu'il avait dit qu'il allait faire. Le peuple de France n'a pas été pris en traitre et le passage d'Emmanuel Macron lors du quinquennat de François Hollande montrait bien la direction que celui-ci souhaitait pour le pays. Alors, que certains Français soient fâchés et auraient souhaité qu'il en aille autrement, c'est entendable mais, si l'on accepte l'idée de la démocratie et du scrutin majoritaire, il faut accepter.
Soyons sérieux. Voyons, tous ensemble, la chance incroyable, l'opportunité qui se présente à nous et, en particulier, à la France des plus modestes d'entre-nous. L'inflation est une magnifique occasion de faire des profits. Imaginez un peu. Vous achetez un bien de consommation aujourd'hui, vous pouvez doubler voire tripler sa valeur de revente dans quelques mois. C'est un peu plus rémunérateur qu'un livret A à la papa, ça. Je reste stupéfait de constater combien on peut se lamenter alors que la chance de (ou le risque) devenir riche à brève échéance s'ouvre à mes chers compatriotes. Si j'avais un conseil à vous donner, ce serait celui-ci : faites des profits ! Et d'ailleurs, Bruno Le Maire le sait bien. Il comprend, lui, la marche du monde et ce qui est bon pour vous. Alors, cessez de vous plaindre, de pleurer, de vous lamenter. Acceptez les promesses du libéralisme, source de bonheur intarissable, fontaine de réussite garantie par l'État, geyser de gloire. Les petits ruisseaux font les grandes rivières. Les petits profits d'aujourd'hui construisent les milliardaires de demain et, je vous le souhaite ardemment, contribueront à vous rendre plus riches, plus puissants, en un mot plus heureux.
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1 De Waldo7624 -
J'ai vu un type hier à la télé, un gars sérieux, genre qui travaille dans une administration complexe chargée d'étudier les problèmes insolubles pour les expliquer au bas peuple, eh ben il avait les cheveux bleus ! C'est donc bien une mode !! Cela dit, au premier paragraphe, je me sens un peu français, surtout pour la langue. Pour le reste, bof... C'est intéressant d'en suivre l'évolution depuis le latin et les différents traités signés, notamment en Europe, et souvent prioritairement dans cette langue française. C'était naguère très à la mode de la parler par les gouvernants des autres nations, plutôt que dans la langue du pays. Bon, ça remonte aux 17é et 18é siècles, évidemment, avant que l'Amérique n'influence le reste du monde avec l'anglais (une belle invention, ça, l'anglais !)
Moi, je stocke les pois cassés, ça c'est un truc qui ne se perd pas et qui se raréfie, donc dans une quinzaine d'années, mon stock aura pris une belle valeur, et avec ça je pourrai m'acheter un véhicule à vapeur (qui sera à la mode alors, j'ai déjà réservé le site cugnot.fr en prévision)
Quant au reste, j'ai pu maigrir en me rendant compte qu'il était plus facile de sauter un repas que la voisine.
2 De Jeannot lou Paysan -
Le constat amer, une autre spécialité française, hein?
Mais comme c'est bien enlevé, et en français, et que tout n'est pas faux, que j'ai pu m'y reconnaître à l'occasion... mais quel talent pour déceler la paille, quand même.
3 De Michel Loiseau -
@Waldo7624 : Moi, ce que je trouve hyper pratique dans la langue française, c'est qu'elle permet de s'exprimer dans une langue comprise par tous les francophones. On ne peut pas en dire autant de beaucoup des autres langages et dialectes.
Pour l'Amérique (les USA je pense) qui influencerait le reste du monde, il me semble bien (mais je peux me tromper) qu'elle a en son temps été gravement influencée par l'Angleterre. Mais je ne suis pas un expert.
Entre la voisine et le repas, je ne choisis pas. Moi, je fais sauter les pommes de terre.
@Jeannot lou Paysan : Alors, d'abord, merci de m'avoir lu. Ce texte se veut avant tout sarcastique et ironique. Que vous vous y retrouviez à l'occasion ne m'étonne pas. Cela fait longtemps que je vous soupçonne de sympathie pour les idées pourries de droite. Je ne vous en veux pas, j'aime avoir des ennemis.
4 De Tournesol -
C était quand même mieux avant , quand il suffisait d’aller tuer un mammouth pour avoir de quoi bouffer gratis pendant 15 jours.
5 De Jeannot lou Paysan -
@ Michel : ah le saligaud! Vous en profitez pour donner libre cours à votre naturel jovial et sympathique, en plus de sarcastique et ironique, comme je l'étais moi-même dans ma réponse, car, n'est-ce-pas, nous avons le droit d'en user aussi?!
Nan, je me reconnaissais dans ces français râleurs. À moins que râler soit un acte de droite? Allez savoir.
Pourtant, ce sont bien les râleurs, râleurs positifs bien sûr, qui font évoluer les choses.
D'ailleurs j'ai observé que hélas lorsqu'on râle pour améliorer sa condition, par exemple pour rendre un travail moins pénible, cela finit toujours par se retourner contre le travailleur. Je vous prends l'exemple de la machine à laver les seaux, facilement duplicable dans de nombreux domaines. 30 piges à se casser le dos pour laver ces foutus seaux (des centaines de seaux par jour), tout en réclamant parallèlement une machine dédiée dans toutes les réunions, et existant depuis lurette. Enfin installée, le constat est vite fait. Avant tout le monde consacrait une partie de son temps à cette tâche ingrate. Aujourd'hui une seule personne suffit à s'en acquitter. Ou comment se tirer une balle dans le pied.
Et pour illustrer votre exemple sur les pâtes, il y a une campagne de pub actuellement, initiée par Intermarché, assez haïssable, qui utilise un truc du genre, sous le couvert de l'humour, et que je trouve stigmatisante pour les plus démunis, ce dont personne n'a rien à foutre.
6 De Waldo7624 -
@Michel : Oui, les USA, mais avant qu'ils ne soient... "unis", ces USA, ça s’appelait l'Amérique (je pense aussi) du Nord, d'accord. Les seuls qui sont restés fidèles à la francophonie sont bien entendu (c'est le cas de le dire) les Québécois. Une pétition datant de 1764 était signée pour se plaindre de l'usage de l'anglais dans les tribunaux (au Québec), 10 ans plus tard une demande est faite pour que la langue française soit employée dans les documents officiels des tribunaux. Demande rejetée, mais acceptée finalement en 1977. Opiniâtres, ces Québécois ! Comme quoi, si on ne veut pas parler anglais, on peut.
Ce Français tant parlé en Europe jusqu'au XVIIIé siècle a été abandonné vers la fin de ce siècle à cause de la Révolution, les dirigeants voisins craignant la contagion, décidèrent de ne plus s'exprimer que dans leur langue.
Perso, je ne crois pas être incapable de penser l'avenir, même si cette notion demande une surdose* d'optimisme. (*pour ne pas employer l'anglicisme habituel) Pour paraphraser Desproges : Vieillesse, arthrose, dégénérescence, avenir... cherchez l'intrus. Mais ça n'empêche pas l'imagination de fonctionner ! Et dire ce que j'imagine pourrait demander des pages et des pages... N'emmerdons personne avec ça.
7 De Jeannot lou Paysan -
Damnation ! Mon épouse, qui ignore que depuis 12h18, ce jour, je suis de droite, m'a fait des patates sautées - batavia arrosées d'eau municipale.
Mais où diable sont les poulardes, le pâté de cerf et le Pommard?
La révélation (tardive) de ce penchant vers la droite par le perspicace Blog-maister me conduit forcément à en adopter les codes. Tenez, si je vous dis que j'ignore dans quel sens on fait un signe de croix, ou que je ne sais pas comment on utilise un chèque-emploi. Pfff...
Et non, je ne confond pas niveau de vie et convictions. Si j'étais de droite, ce serait pour défendre ma fortune et mon patrimoine contre ces salauds de partageux de gauchistes. En mai 81, j'ai pu mesurer exactement pourquoi les commerçants de mon patelin étaient de droite. On était assez loin de Bernard Arnault. Ils avaient peur tout simplement qu'une clique de crève-la-faim fraîchement désinhibés leur pique leurs précieux avoir. Certains parlaient même de décrocher le fusil. Quelle rigolade! Les militants du RPR, sur le pied de guerre, tenaient leurs réunions chaque vendredi soir, pour préparer un putsch sans doute, pendant qu'un des leurs, accompagné d'un doberman, si si, surveillait les béhèmes et les Mercedes sur le parking de la salle de réunion.
Rarement j'ai pu assister à une telle effervescence dans un bourg de 2500 habitants, et puis, tout doucement, les gens se sont calmés ...et les riches ont gardé leur pognon.
8 De Waldo7624 -
Naguère on a tenté de brosser ici le portrait d'un anarchiste type, mais la révolte grondant il a été admis qu'on ne pouvait les catégoriser avec précision.
En serait-il autrement des gens de droite ? Ou même de gauche, voire de l’extrême centre ?
Dessine moi un mouton...
9 De Tournesol -
Définir,c’est figer.Et je ne connais pas beaucoup d’individus suffisamment stupides pour être définitivement invariables.Même sur le plan psychiatrique,il n’y a pas de pathologie garantie inaltérable et invariable.
Même le camarade Dieu a plusieurs fois changé d’avis si l’on en croit ses différents porte parole !!!
A qui se fier?
Et pourquoi se fier d’ailleurs ?
10 De Jeannot lou Paysan -
@ Tournesol: "il n'y a que les ânes qui ne changent pas d'avis".
Parfois il convient même d'effectuer rapidement ce changement, selon que l'on aime, ou pas, les petits plaisirs que la vie peut offrir. Demandez à Galilée.
Je me souviens d'un cours d'histoire-géo où le prof nous expliquait comment, dans les lointains kolkhozes soviétique, le rendement des cultures dans les champs de la collectivité était bien inférieur à celui des petits lopins individuels réservés à chaque travailleur pour nourrir sa famille.
Travailler pour soi c'est plus motivant sans doute. Était-ce un comportement déviant? C'est surtout dans la nature des hommes, bien au-delà des belles doctrines, ou même de la peur du goulag.
11 De Michel Loiseau -
C'est un peu intéressant, cette histoire de kolkhozes. En Palestine puis en Israël, il y a les kibboutz.
Les Kolkhozes étaient globalement inefficaces, c'est un fait. Il y a un article wikipedia qui explique un peu le fonctionnement de ces structures (kolkhozes et sovkhozes). A mon avis, le problème était bien qu'elles n'étaient pas gérées comme des structures collectives et égalitaires. Il n'en est pas question dans l'article de wikipedia mais j'ai lu sur ce sujet et il y a eu souvent à la base des problèmes liés à la défaillance des autorités. Par exemple, des problèmes avec la mécanisation, du matériel inopérant, souvent en panne ou inadapté, des exigences de production pour des cultures incompatibles avec la terre ou le climat.
Sous Staline, il y a eu l'épisode dramatique de l'Holodomor, en Ukraine, durant lequel des millions d'Ukrainiens sont morts de faim. Je ne me souviens plus du fond mais je me souviens qu'il y a eu aussi un agronome cinglé qui conseillait Staline et qui a provoqué des famines. Je chercherai.
A propos de l'Holodomor, j'ai vu un film diffusé sur Arte, L'ombre de Staline, de Agnieszka Holland qui traite du sujet. C'est disponible jusqu'au 18 avril, est-il indiqué sur le site de la chaîne. Ce n'est pas joyeux mais c'est bien réalisé et bien filmé en plus d'être instructif.
Pour en revenir à l'idée selon laquelle l'individu est plus efficace que le groupe, je doute un peu. Dans de nombreux domaines, il serait impossible à une personne seule de produire quoi que ce soit. Et puis, combien d'entreprises fonctionnent correctement grâce à la bonne volonté et à l'implication des salariés quand les dirigeants font n'importe quoi ? J'ai personnellement eu à expérimenter le fait. Si je n'ai pas une grande expérience de la vie salariale, je sais que nombre d'entreprises tiennent par l'amour du travail bien fait, par la motivation, par l'esprit d'entreprise plus que par les décisions patronales.
Il me paraît évident que lorsque vous êtes employé à une tâche qui vous semble dénuée de sens, que lorsque l'on vous demande de produire de la merde, que l'on dévalorise votre savoir-faire, que l'on vous interdit d'avoir la moindre idée ou de faire la plus petite proposition quant à l'organisation du travail, ça ne peut pas donner de bons résultats.
12 De Michel Loiseau -
Ah ! Pour l'agronome préféré de Staline, c'est Trofim Lyssenko (wikipedia)
13 De Jeannot lou Paysan -
@ Michel : Merci pour ces infos. Je ne manquerai pas de regarder.
14 De fifi -
Kirikiki !