Sur le fil

Au fil de l'eau, au fil des heures, au fil des jours, sur le fil, le fil du rasoir, le fil à plomb, garder le fil de ses idées. Et bien sûr, le fil de fer, le fil de coton, le fil électrique. C'est curieux comment de simples mots comme celui-ci peuvent être polysémiques. Suivre le fil de la conversation et donner un coup de fil pour parler du fil à couper le beurre, à l'aide d'un téléphone sans fil. Il y a aussi le fil d'Ariane et on me dit que ça n'a pas grand rapport avec la fusée.
Le fildefériste, mince comme un fil, filait sur son fil.

Ça a commencé de la manière la plus inattendue possible. Nul n'aurait pu le prévoir, pas même l'auteur, moi en l'occurrence. Est-ce que je pouvais me douter, en laissant courir la mine sur la surface immaculée de la feuille de papier que ça allait donner ce dessin ? Non. Il n'y avait aucune intention particulière ou, tout du moins, aucune intention consciente. Peut-être y aura-t-il eu, à un moment, à la radio, une phrase ou un simple mot qui aura guidé le trait. D'abord, si je me souviens bien, il y a eu le nez. Un gros nez. Puis des yeux encerclés par ce qui deviendra la tête, le visage, avec ses oreilles, ses cheveux. Un trait a donné la direction du buste et une jambe a jailli.
Cela devenait délicat. Qu'allais-je bien pouvoir faire de cette position qui apparaissait ? J'avais la solution maintes fois éprouvée d'avoir recours à la gomme. Je pouvais encore tout effacer, repartir de zéro, recommencer voire abandonner, prendre une autre feuille de papier, utiliser l'autre face, aussi. A ce moment, j'aurais pu faire une sorte de cercle aplati et dessiner une moto ou une automobile ou un camion.
Je ne sais pas pourquoi mais j'ai préféré continuer. Une sorte de défi que je me lançais, un challenge. Il y avait cette jambe projetée vers l'avant qui déséquilibrait le personnage, il fallait que les bras l'aident à à ne pas conserver une pose improbable. Il était impératif que l'on ne puisse pas m'accuser de faire n'importe quoi n'importe comment. De la crédibilité, nom de dieu !
Bon. L'équilibre est rétabli. Ça n'explique pas comment il en était arrivé là. Comment faire croire que, finalement, c'est possible, qu'il y a une explication à tout ça. C'est là que le fil est venu à la rescousse. Il suffisait de le tendre (mais pas trop) pour que la situation soit sauvée. Ça ne tenait qu'à un fil.

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